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La PAC, un enjeu pour l’avenir

Par Josselin de ROHAN, Président du groupe UMP du Sénat, sénateur du Morbihan et Bernard ACCOYER, Président du groupe UMP de l’Assemblée nationale, député de la Haute-Savoie
Le Figaro, 24 juin 2005

Nous avons été choqués lors du dernier Conseil européen par la manière dont la politique agricole commune (PAC) a été mise en cause par quelques pays en tête desquels la Grande-Bretagne. Tout aussi choquant a été le relais assuré à cette thèse par certains commentateurs qui, en France, se complaisent à dénigrer notre agriculture, les agriculteurs et la politique agricole européenne. En caricaturant une politique agricole qui, à les entendre, n’aurait pas évolué depuis le traité de Rome, ils ignorent ce que représente l’agriculture en France et en Europe.

Pourquoi tant de hargne, sommes-nous tentés de nous interroger ? Pourquoi cette mise en cause brutale d’une politique agricole qui serait le vestige du passé en Europe quand, aux États-Unis, avec davantage de moyens encore, la politique agricole est indiscutée. Quand nous battons notre coulpe, les Américains brandissent l’arme alimentaire ! Et nous, européens, nous devrions laisser tomber notre agriculture et nos agriculteurs alors que nous sommes le deuxième exportateur mondial de produits agricoles bruts et le premier de produit agricoles transformés ? Nous ne devons pas succomber à ce piège où certains voudraient nous emmener sur la base d’arguments faciles mais techniquement erronés et politiquement dangereux.

Pour tuer son chien, on dit qu’il a la rage. La technique est ancienne et éprouvée. C’est celle employée par les Anglais depuis toujours à propos de la PAC. En disant que la PAC coûte trop cher et qu’elle est une politique du passé, une politique de la « vieille Europe » diraient les Américains, Tony Blair joue sur du velours, mais il joue contre l’Europe.

Non, la PAC n’est pas une politique du passé. L’agriculture européenne est une force pour l’Union européenne. Les réformes successives de la PAC en garantissent la pertinence, la compétitivité et l’efficacité dans un monde où les questions alimentaires ont été, sont et seront essentielles. Il est grand temps de rétablir quelques vérités.

Tout d’abord, il est faux de dire que l’agriculture bénéficie de 40% des dépenses européennes. Parce que la PAC est la seule politique européenne complètement intégrée, plus de 85% des dépenses publiques en faveur de l’agriculture européenne relèvent du budget européen, le reste étant financé par les budgets nationaux. Ainsi, en comparant ce qui est comparable et pour reprendre l’exemple de la recherche, cher à Tony Blair, les dépenses publiques européennes en faveur de la recherche (budgets nationaux et budget communautaire) sont près de deux fois supérieures aux dépenses agricoles qui représentent moins de 1% des dépenses totales des États membres.

Et ces dépenses agricoles sont elles aussi utiles, indispensables même. Elles ne servent pas seulement à protéger le revenu des agriculteurs. Plus de 10% des emplois de l’Union européenne, et près de 20% de l’emploi privé en France, en sont dépendants dans l’ensemble de la filière agroalimentaire et 450 millions d’Européens en bénéficient en ayant accès à des produits alimentaires de qualité au meilleur prix. 1% des dépenses publiques pour 10% des emplois et la sécurité alimentaire de tous les européens, est-ce trop cher payer ?

C’est bien pourquoi le président de la République a raison de dire que la PAC est moderne. Elle est utile et efficace. Et elle est moderne aussi parce qu’elle a su évoluer au cours des vingt dernières années et se réformer à quatre reprises pour prendre en compte les progrès de l’agriculture européenne, l’évolution des marchés mondiaux et les attentes des consommateurs européens.

La PAC est moderne aussi dans les relations qu’elle a établies avec les pays en développement qui bénéficient d’un accès privilégié au marché européen. Cela contredit tout le discours selon lequel l’Europe et la PAC tuent l’agriculture des pays pauvres. De tels excès de langage sont malheureusement devenus des banalités relayées par ceux qui prennent pour argent comptant n’importe quel slogan, relayant un malthusianisme de bon aloi qui poursuit ses ravages alors que le monde a faim.

Notre responsabilité, nous qui disposons d’un potentiel agronomique exceptionnel, c’est de produire des aliments pour tous ceux qui en ont besoin. Nous le faisons dans le respect des agricultures des pays les plus pauvres. C’est pourquoi l’Europe est de loin le premier importateur de produits agricoles en provenance des pays en développement. Elle importe à elle seule plus de ces pays que les États-Unis, le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et le Japon réunis. On accuse l’Europe de déstabiliser les marchés agricoles des pays en développement mais qui a remarqué que les cultures les plus déterminantes pour le revenu des agriculteurs des pays en développement sont le coton, le riz, l’arachide, le café ou le cacao ; des cultures quasi inexistantes en Europe ?

Enfin, dans le cycle des négociations en cours à l’OMC, seule l’Union européenne a proposé des évolutions en faveur des pays les plus pauvres. Nous attendons toujours les engagements des Américains. C’est aussi Jacques Chirac qui a pris l’initiative de proposer, avec d’autres chefs d’État dont le président Lula du Brésil, une taxe internationale pour financer le développement. C’est lui aussi qui a initié la création de la Fondation pour l’agriculture dans le monde (Farm). Alors pourquoi travestir toute cette réalité, caricaturer l’action et ainsi accepter de faire le jeu de tous ceux qu’une agriculture européenne puissante gêne ?

La France défend la PAC c’est un fait. Il faut mettre au crédit de Jacques Chirac d’avoir su résister aux démolisseurs lors du dernier Conseil européen. La France n’est pas seule et c’est ce qui nous rassure. Quant aux leçons de solidarité, nous pourrions aussi en donner car c’est à l’initiative de la France que le compromis de Bruxelles d’octobre 2002 sur le plafonnement des dépenses agricoles a pu se conclure. C’est grâce à cette initiative qu’a pu être décidé en décembre 2002 l’élargissement aux dix nouveaux États membres qui se trouvait bloqué du fait du surcoût provoqué sur la PAC et que de nombreux pays refusaient de financer.

Nous aimerions appeler les donneurs de leçons à plus de modestie. L’Europe a payé cher les erreurs anglaises en matière agricole et de sécurité alimentaire. Les deux principales crises sanitaires que nous avons connues ces dernières années, « vache folle » et fièvre aphteuse, nous sont venues de Grande-Bretagne. Elles ont eu et ont encore un coût très important pour le budget de l’Union européenne et des États membres, une poignée de milliards d’euros !

Mais il faut reconnaître aux Anglais une constance : depuis leur adhésion, et même avant, ils n’ont cessé de mettre en cause la PAC par tous les moyens, en Europe et aussi à l’extérieur. Ils ont aussi une autre constance : critiquer mais en profiter autant que possible. Que ce soit des Anglais qui touchent les plus gros chèques de la PAC ne les gêne pas !

Faut-il en ajouter encore pour démonter un discours qui séduit parce qu’il détruit ? Après le vote en faveur du non au référendum, très fort dans nos campagnes, nous entendons tous ceux qui pensent que c’est l’occasion de « lâcher » les agriculteurs parce qu’en votant non ils ont agi contre leur propre intérêt. Ce n’est pas notre conception de l’action publique parce que ce qui est en jeu c’est l’intérêt général de notre pays et de l’Europe. Que beaucoup d’agriculteurs aient été égarés, nous en sommes convaincus. Aujourd’hui, ceux qui les ont emmenés dans cette voie se font particulièrement discrets ; où est leur solution de rechange ? Mais il ne s’agit pas de régler des comptes, il faut préparer désormais l’avenir et l’agriculture fait partie de cet avenir européen. N’en déplaise à M. Blair !

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